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Comment Mayotte est devenue le laboratoire idéologique de l’extrême droite

Marine Le Pen déteste entendre parler du Front national (FN), alors Gérald Darmanin insiste. Depuis juin 2018 et le changement de nom du parti, l’élu du Nord prend plaisir à ne jamais évoquer le Rassemblement national (RN). Une preuve qu’il ne céderait rien au mouvement d’extrême droite. En moins de deux mois, le ministre de l’intérieur et des outre-mer vient pourtant d’avaliser deux totems de l’ex-FN.
Après l’inscription, le 19 décembre 2023, d’une forme de « préférence nationale » dans un projet de loi « immigration » depuis largement censuré par le Conseil constitutionnel, Gérald Darmanin a promis, le 11 février, de réviser la Constitution pour y inscrire la fin du droit du sol à Mayotte. Une mesure que le même refusait à Jean-Marie Le Pen, le 15 mars 2018 sur France 2, dénonçant alors un « discours » racialiste et l’atteinte à un « droit républicain » : « Il n’y a pas deux catégories de Français, il n’y a pas deux catégories de territoires. »
Six ans après avoir balayé l’idée face au finaliste de la présidentielle de 2002, le ministre de l’intérieur justifie de restreindre localement l’accès à la nationalité par la nécessité de couper « littéralement l’attractivité » de Mayotte. L’île de l’océan Indien, dont la moitié des 310 000 habitants recensés par l’Insee en 2017 étaient étrangers, est paralysée par des barrages installés par des « collectifs citoyens » protestant contre l’insécurité et l’immigration incontrôlée.
Qu’importe l’issue incertaine d’une telle réforme constitutionnelle, l’extrême droite – et une partie de la droite – a vite réclamé son extension à l’ensemble du territoire national. « Ce qui est en train de se passer à Mayotte est à regarder avec grand intérêt, parce que c’est le futur de notre territoire », a répété le président du RN, Jordan Bardella, le lundi 12 février sur Franceinfo. Sans appuyer ses prédictions sur plus de données démographiques, sa concurrente, tête de liste Reconquête ! aux élections européennes de juin, Marion Maréchal, estimait elle aussi la veille que ce que « vit Mayotte aujourd’hui, c’est ce que vivra la métropole dans trente, quarante, cinquante ans si nous ne faisons rien ».
En plus de la suppression du droit du sol partout en France, Marine Le Pen a appelé le gouvernement, mardi 13 février à l’Assemblée nationale, à rétablir « le retour de l’Etat dans toutes ses dimensions » à Mayotte en y instaurant l’état d’urgence et la « priorité nationale ». Soit la clef de voûte de ses programmes présidentiels pour privilégier l’accès des Français à l’emploi, au logement et aux aides sociales.
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